Suite à l’échec allemand de la Bataille d’Angleterre, qui oppose la Luftwaffe à la RAF lors de l’été 1940, Hitler se fixe un autre délai pour mener à bien son projet d’invasion de la Grande-Bretagne. En préparation de cette opération, la 15ème Armée est constituée en Allemagne regroupant plus de 230 000 hommes.
Suite à divers essais infructueux, l’opération d’invasion est abandonnée et de ce fait la 15ème Armée se voit affectée à une autre tâche : la surveillance des côtes allant des Pays-Bas à l’Orne, en Normandie.
La 15ème Armée, avec le 88ème corps en Hollande et la 7ème Armée (Orne à St-Nazaire), est intégrée au groupe d’armée B qui passera sous les ordres du Maréchal Rommel à partir de novembre 1943.
L’Etat-Major de la 15ème Armée arrive donc à Tourcoing et s’installe dans la partie sud où résident les grands patrons de l’industrie textile régionale, propriétaires de maisons de maître que l’on pourrait volontiers qualifier de « petits châteaux ». Cette zone est aussitôt interdite à la population civile.
Après la tentative de débarquement anglo-canadienne à Dieppe, le 19 août 1942, Hitler prend conscience de la priorité qu’il faudrait accorder aux fortifications côtières. C’est ainsi que la 15ème Armée, qui est restée jusque-là quasiment inactive en la matière, se lance dans la fortification de sa zone. Dés septembre 1942, la construction des blockhaus avenue de la Marne débute. Au total, une quinzaine de bâtiments apparaissent dont le bunker de commandement, aujourd’hui transformé en musée. La circulation sur cette partie de l’avenue de la Marne est défendue et seul le « mongy » (surnom du tramway lillois provenant de son inventeur) peut toujours passer, mais avec l’interdiction formelle de s’arrêter dans cette zone.
L’importance du site est considérable puisque 23 autres émetteurs du Nord de la France dépendent de lui. Le centre d’écoute de la Hague, de la 7ème Armée, de même fonction que celui de Tourcoing, ayant été détruit par des bombardements en mai 1944, il ne reste plus en activité, au moment du débarquement allié en Normandie, que celui de Tourcoing. Pourtant les alliés connaissaient l’existence de ce centre d’écoute mais il fut épargné afin de servir à l’opération Fortitude : induire l’armée allemande en erreur sur un débarquement dans le Pas-de-Calais.
Fait historique d’une grande importance pour l’histoire du débarquement du 6 juin 1944, c’est dans le centre d’écoute radio de Tourcoing que fut correctement interprété le message de radio-Londres, dans l’émission « les Français parlent aux Français », qui était extrait d’un poème de Verlaine : « Les sanglots longs des violons de l’automne blessent mon cœur d’une langueur monotone ».
Dans la soirée des 1er 2 et 3 juin 1944, est lancé sur les ondes par la BBC, au milieu des « messages personnels », la première partie du code, « les sanglots longs… », prévenant la Résistance de se tenir prête à agir. Dans la soirée du 5 juin 1944 à 21h15, la seconde partie du message est diffusée pour mettre en état d’alerte la Résistance : « Blessent mon cœur… ».
Grâce à des informations transmises par l’amiral Canaris, le Lieutenant-Colonel Meyer, chef du service de renseignement de la 15ème Armée, sait que lorsqu’il entendra sur la BBC les fameux vers de Verlaine, diffusés entre le 1er et le 15 du mois, le débarquement allié aurait lieu dans un délai de 48 heures, à partir de la diffusion du deuxième vers.
Le 5 juin 1944 à 21h15, le centre d’écoute de Tourcoing est donc en alerte, il a réussi à interpréter correctement le message Verlaine. A 21h20, Meyer est averti et à 22h00 le Général Von Salmuth, commandant de la 15ème Armée est alerté. Quelques minutes plus tard, la 15ème Armée est en alerte maximale, prête à combattre.
Mais l’œuvre des services secrets alliés, grâce à l’opération Fortitude a déjà porté ses fruits : on ne veut pas prévenir Hitler sur le champ, il a eu une réunion importante et a ordonné qu’on ne le réveille pas. Rommel a quitté la France pour fêter l’anniversaire de son épouse en Allemagne, ne pensant pas que les Alliés tentent un débarquement par une météo aussi mauvaise qu’en ce début juin. Les principaux commandants allemands de ce qui va devenir le front de Normandie ne sont pas à leur poste car ils participent ensemble à un Kriegspiel (exercice de stratégie) dont le thème est, ironie du sort, le débarquement allié !
C’est donc un véritable « non événement historique » qui s’est produit à Tourcoing, les Allemands ne profitant pas de l’atout considérable qu’ils obtiennent avec le décodage du message Verlaine.
Depuis 1991, la visite permet de découvrir un blockhaus entièrement restauré, qui a joué un rôle historique important lors du débarquement en Normandie. Plusieurs salles ont été reconstituées comme à l’époque : locaux techniques (ventilation et électricité), cuisine, sanitaires, chambre/bureau du général, central téléphonique, station d’écoute, etc. On y découvre aussi une importante collection. Des documents sur la région sous l’occupation sont présentés ainsi que de nombreux matériels de la guerre des ondes qui sont uniques dans un musée : appareils de radio-goniomètrie allemands, français de Vichy, anglais, etc. Des télex d’époque sont également présentés. Ces matériels, très sophistiqués pour l’époque, ont bien souvent continué leur carrière après la guerre dans les armées européennes. Leur regroupement en un seul lieu est exceptionnel.
De nombreuses saynètes reconstituées présentent des mannequins complets en tenues d’époque avec matériels et armements. La vie civile est également retracée grâce à la reconstitution d’un intérieur de maison avec tous les accessoires d’époque.
Guidées, les visites durent en général entre 1h30 et 2h00 pour visiter la quinzaine de salles présentées au public.
1. Entrée des hommes de troupes / Accès aux locaux techniques
2. Poste de garde
3. Salle ventilation
4. Salle du groupe électrogène
5. Entrée des officiers
6. Douche de décontamination
7. Sas de décontamination
8. Poste de garde / Cuisine
9. Couloir du général
10. Bureau du général
11. Entrée du tunnel du bunker
12. Douche de décontamination
13. Sas de décontamination
14. Toilettes
15. Standard téléphonique
16. Salle de Radiogoniométrie
17. Bureau du Lieutenant-Colonel Meyer
18. Bureau de l’ANA 509
19. Bureau de l’ANA 509
20. Salle des dessinateurs
21. Salle des cartes
Situé dans le parc de la villa Caulliez, le bunker de commandement est composé de 15 pièces. Il était relié par un tunnel à la villa Six, où se trouvaient les principaux services de l’état-major de la XVème Armée. Le général quant à lui, logeait dans la propriété Tiberghien.
Le blockhaus, semi enterré, réalisé par coulée de béton en coffrage bois est constitué de murs extérieurs de 2 mètres d’épaisseur, le tout basés sur des fondations de 1,5 m de béton.
Longueur du bunker : 32 mètres
Largeur du bunker : 16 mètres
Epaisseur du plafond : 2,5 mètres
Epaisseur des murs extérieurs : 2 mètres
Epaisseur des murs intérieurs : 80 centimètres
Poids total du bunker : 6700 tonnes de béton armé
La dalle de béton, de 1,5 mètres d’épaisseur, déborde de 2 mètres sur les extérieurs du bunker
Pénétrez à l’intérieur d’un mastodonte de 6700 tonnes de béton armé au plafond de 2,5 mètres de haut et aux murs de 2 mètres d’épaisseur ! Découvrez également comment le bunker pouvait fonctionner en parfait autonomie en cas d’attaque ou de bombardement.
Plusieurs salles ont été reconstituées comme à l’époque : locaux techniques (ventilation et électricité), cuisine, sanitaires, chambre/bureau du général, central téléphonique, station d’écoute, etc.
Forte de 230 000 hommes, la 15e Armée devait défendre la zone la plus propice à un débarquement allié selon l’état-major allemand. Bien reculé à l’intérieur des terres, le QG occupait le quartier tourquennois où résidaient les plus grandes familles du textile dans d’imposantes maisons de maître et supervisait le positionnement de toutes ses unités prêtes à repousser les Alliés à la mer.
Plongez au sein de ce quartier interdit aux civiles et fortifié pour y découvrir comment s’organisait l’état-major de la plus forte armée d’Europe en prévision d’une attaque imminente.
Les visiteurs pourront découvrir ou se souvenir du quotidien des civils de l’agglomération lilloise comme le rationnement, les réquisitions, la défense passive, la cohabitation forcée avec l’armée allemande ou encore le STO. Au travers de nombreux documents et objets d’époque, les plus anciens se souviendront du fameux savon « Sunlight » (prononcé « sinliche » à l’époque) ou des tickets de rationnement et les plus jeunes seront certainement surpris par la dureté de la vie des civils sous l’occupation.
Ce thème est aussi l’occasion pour l’équipe du Musée d’exposer les nombreux dons que les habitants de la métropole lilloise ont fait ces dernières années. La majorité de ces dons illustrent en effet parfaitement ces années sombres et derrière chaque objet ou lettre se cache une anecdote que les guides ne manqueront pas de vous raconter.
A découvrir également une exposition de photos inédites sur Tourcoing et Lille qui furent prises par des soldats allemands travaillant au sein du QG de Tourcoing.
Sous la responsabilité du Lieutenant-colonel Helmut Meyer, chef du Service de Renseignement, le centre d’écoute est en activité 24h/24. Le matériel radio allemand est très perfectionné pour l’époque (il sera réutilisé en partie après-guerre par l’armée), mais c’est sur des postes radio classiques que les opérateurs-interprètes guettent l’activité de l’ennemi.
Ce centre d’écoute captait un grand nombre de messages codés envoyés par les réseaux de résistance venant des pays alentours. Ces nombreux messages, enregistrés sur des magnétophones, étaient systématiquement décodés dans le bureau des interprètes jouxtant la salle radio.
La localisation des émetteurs clandestins étant faite par des véhicules équipés de systèmes radio-gonio mobiles qui étaient dépêchés sur les lieux afin d’affiner leur recherche.
Pour parfaire leur délicate recherche d’émetteurs clandestins implantés en ville, les membres du service de renseignement et de la sinistre Gestapo, disposant de matériel miniaturisé, traquaient impitoyablement la Résistance.
La commémoration du Débarquement est au cœur de nos activités annuelles pour deux raisons, l’une historique, l’autre correspondant à notre travail de mémoire :
l’interception du message Verlaine annonçant le Débarquement a été effectuée par les Allemands dans le bunker que nous occupons ; ce qui nous rattache directement aux événements du 6 juin.
Le Débarquement en Normandie est le symbole d’une liberté retrouvée pour l’Europe entière.
Le Débarquement est devenu un symbole de la Libération. Pour nous qui sommes attachés à la réconciliation franco-allemande, il est le symbole de la libération de l’Europe entière ; c’est à dire aussi celui de la libération de l’Allemagne du joug nazi. Ce Débarquement a offert les conditions nécessaires à la construction d’une Europe basée sur des principes complètement opposés à ceux du nazisme.
Evoquer la nécessité de l’engagement à travers l’exemple du Débarquement en Normandie, c’est en particulier rappeler que de jeunes Américains, Canadiens, Anglais, Australiens, Belges ou Polonais n’ont pas hésité à engager leur vie sur notre sol national pour notre liberté et le triomphe de certaines valeurs en Europe.